• ➤ La CIA à Hollywood

      Cet article est la traduction de l'introduction de The CIA in Hollywood, par Tricia Jenkins, professeur à la Texas Christian University. 

     

    La CIA à Hollywood

     

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    Les agences gouvernementales américaines emploient depuis bien longtemps des officiers de liaison dans le milieu du divertissement pour améliorer leur image dans les médias. Par exemple, le FBI a, dans les années trente, créé un bureau ayant pour objectif de parfaire son image dans des programmes radio, dans des films, et dans des séries télévisées, comme avec Les hors-la-loi (1935), La police fédérale enquête (1959), et Sur la piste du crime (1965-1974). Le département de la défense lui emboîta le pas en 1947, et de nos jours l’Army, la Navy, l’Air Force, le corps des marines, les gardes-côtes, le département de la sécurité de la patrie, et le Secret Service possèdent tous des divisions cinéma et télévision, ou emploient des assistants officiels détachés auprès des médias. Même les programmes gouvernementaux travaillent actuellement avec Hollywood, comme le montre Hollywood, Health, and Society – un programme financé en partie par les Centers for Disease Control and Prevention et par les National Institutes of Health pour fournir à l’industrie du divertissement des scénarios en lien avec le domaine de la santé.

    Bien qu’elle ait été créée en 1947, la CIA fut la dernière agence gouvernementale à établir des relations formelles avec l’industrie du cinéma. En fait, elle n’a pas financé de programme centré sur le divertissement avant le début des années quatre-vingt-dix, et elle n’embaucha son premier officier de liaison avec l’industrie du divertissement, Chase Brandon, qu’en 1996. L’implication de la CIA dans la télévision et le cinéma, ses collaborations, ses motivations et sa méthodologie n’ont été que très peu étudiées, peut-être parce que son activité dans ce domaine est relativement récente. Cette absence de recherche académique est toutefois surprenante, sachant que l’agence a façonné le contenu de nombreux films et produits télévisuels, parmi lesquels JAG (1995-2005), Ennemi d’État (1998), In the Company of Spies (1999), Espions d’État (2001-2003), Alias (2001-2006), 24 heures chrono (2001-2010), Bad Company (2002), La somme de toutes les peurs (2002), La recrue (2003), Covert Affairs (2010-2014), et Argo (2012). Des administrateurs de la CIA ont aussi rencontré des dirigeants de studios et des agents artistiques dans le but d’influencer leur perception de l’agence sur un plan plus large, et des agents de la CIA à la retraite ont de même contribué à l’élaboration de nombreux films, dont Les experts (1992), Mon beau-père et moi (2000), Syriana (2005), Raisons d’état (2006), Détention secrète (2007), La Guerre selon Charlie Wilson (2007), Salt (2010), et Red (2010).

    Alias

    Il en résulte que ce livre aura pour objet de répondre à un certain nombre de questions importantes concernant la CIA et son implication à Hollywood (qui est utilisé ici comme un raccourci pour désigner à la fois les industries du cinéma et de la télévision américaines). Voici quelques unes de ces questions : quelle est la nature du rôle de la CIA dans l’industrie cinématographique ? Quels événements ont motivé Langley (utilisé ici comme un raccourci pour désigner la CIA dans son ensemble) dans les années quatre-vingt-dix pour inverser sa politique de non-ingérence concernant Hollywood ? En quoi le rôle joué dans l’industrie du divertissement par un agent de la CIA à la retraite diffère-t-il du rôle joué par l’agence, et pourquoi ces agents à la retraite ont-ils généré autant de critiques venant du gouvernement ? Comment le cinéma et la télévision ont-ils traditionnellement dépeint l’agence ? Et quels sont les problèmes légaux et éthiques soulevés par une relation entre Hollywood et la CIA, en particulier dans une démocratie ?

    Pour répondre à ces questions, ce livre se fonde sur une analyse textuelle minutieuse de plusieurs documents fournis par la CIA et intègre les recherches et articles de journaux parus à ce sujet. De plus, et ce qui est peut-être plus important encore, The CIA in Hollywood s’appuie sur les nombreux entretiens que j’ai menés avec le personnel des relations publiques de la CIA, avec des officiers traitants, des historiens, ainsi qu’avec des consultants techniques d’Hollywood, et des producteurs et des scénaristes qui ont travaillé avec l’agence pendant des années. Ces entretiens apportent un meilleur éclairage sur la nature des documents fournis par la CIA, ainsi qu’une perspective différente sur les coulisses et la réalité économique d’Hollywood.

    Ce livre est important parce que peu de gens savent que la CIA a participé activement à la création d’œuvres présentées au cinéma et à la télévision, et qu’ils ne parviennent pas à comprendre comment ou même pourquoi l’agence s’est impliquée dans ce secteur de façon plus formelle au cours des quinze dernières années. De plus, comme l’écrivent Matthew Alford and Robbie Graham, « les débats académiques sur la propagande cinématographique sont presque toujours rétrospectifs, et alors qu’un certain nombre de commentateurs ont attiré l’attention sur la relation durable existant entre Hollywood et le Pentagone, les écrits sur les influences plus souterraines qui traversent Hollywood depuis le 11 septembre sont peu nombreux. »[1] En effet, l’une des principales idées fausses concernant la CIA est qu’elle évite l’exposition médiatique ; en fait, comme le souligne Richard Aldrich, la majorité des connaissances que nous possédons sur Langley a été placée dans le domaine public par l’agence elle-même, car elle comprend l’importance de contrôler son image publique.[2] En révélant ce qui est resté, à ce jour, l’histoire en grande partie secrète de la CIA à Hollywood, ce projet invite les lecteurs à devenir des consommateurs plus critiques des médias contemporains, et à approfondir la discussion académique entourant le complexe gouvernement-divertissement moderne.

    Mais ce livre a ses limites. La CIA est loin d’être une organisation ouverte, et nombre des employés de l’agence sont restés lèvres closes, même en ce qui concerne les informations les plus basiques. De même, comme la CIA a souvent préféré communiquer avec des agents du monde du spectacle par l’intermédiaire de conversations téléphoniques plutôt que par des lettres ou des courriers électroniques, et comme beaucoup de ses documents n’entrent pas dans le cadre de la loi sur la liberté de l’information, la CIA laisse rarement des traces écrites de ses activités. De plus, lorsque Chase Brandon quitta son poste d’agent de liaison entre la CIA et l’industrie du divertissement pour partir à la retraite en 2006, il aurait emporté avec lui tous les numéros de téléphone et les documents en lien avec son travail, et ainsi, comme l’explique son successeur Paul Barry, « il ne reste rien du passé (de 1995 à fin 2006) », ce qui laisse les chercheurs avec encore moins de documentation à examiner.[3] Il en résulte que l’histoire de la CIA à Hollywood est, de nos jours, plus une histoire orale qu’écrite, ce qui est encore compliqué par le fait que ceux qui travaillent à Hollywood sont souvent trop occupés, ou tout simplement ne souhaitent pas parler de leur collaboration avec le gouvernement avec des chercheurs académiques. De plus, comme la relation entre la CIA et Hollywood contient une part de « politique souterraine » – appelée ainsi parce qu’elle implique « des activités qui ne peuvent, pour l’instant, pas être entièrement compréhensibles en raison de l’influence occulte exercée par des acteurs majeurs restés dans l’ombre »[4] – ce livre ne peut raisonnablement prétendre à dévoiler l’intégralité de l’implication de la CIA dans le cinéma au cours des quinze à vingt dernières années ; en effet, certaines de ces collaborations pourraient n’être jamais révélées, ou leur nature exacte restera mystérieuse. Ce livre ne pourra donc que dévoiler une part significative de l’histoire secrète de l’implication de la CIA dans le cinéma et la télévision, évaluer l’impact de cette histoire, et poser une base solide sur laquelle pourront se fonder de futures enquêtes sur la CIA à Hollywood.

     

    Le rôle et la structure de la CIA

    Avant d’analyser en détail l’implication actuelle de la CIA à Hollywood, il est important de rappeler brièvement la structure et les missions de l’agence, et l’étendue de sa collaboration avec l’industrie du cinéma avant les années quatre-vingt-dix. La loi sur la sécurité nationale de 1947 a officiellement créé la Central Intelligence Agency. La loi, signée par le président Truman, institua un service de renseignement centralisé dont l’objectif était de corréler, d’évaluer et de disséminer les informations affectant la sécurité nationale. Les informations collectées par la CIA aident les dirigeants de l’armée, du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif dans leurs processus de prise de décision. Contrairement au FBI, qui collecte essentiellement des informations sur les sujets américains, la CIA n’est autorisée à travailler qu’à l’étranger (mais elle peut recueillir des informations sur les sujets étrangers présents sur le sol américain). De plus la CIA n’a pas « de pouvoirs de police, de maintien de l’ordre ou de sécurité intérieure, et ne peut émettre d’assignation à comparaître. »[5]

    Bien que la mission déclarée de la CIA soit de fournir les renseignements nécessaires à la sécurité nationale au président ainsi qu’aux dirigeants du Congrès, l’agence prend également part à des actions clandestines. Historiquement, ces opérations incluaient des activités paramilitaires et des campagnes de propagande ayant pour but de déstabiliser et d’influencer des régimes hostiles, même en temps de paix. Afin de se ménager l’argument du « démenti plausible », la CIA utilise des fonds secrets pour mener ces opérations clandestines, et bien que ces activités soient souvent controversées, il est important de rappeler que la capacité de la CIA à mener des actions clandestines s’exerce sous l’autorité du président. Aucune action clandestine n’est censée être entreprise sans instructions explicites émanant de la présidence, ou, depuis les années soixante, un « finding », qui est une autorisation légale portée à la connaissance des superviseurs du Congrès.

    Pour pouvoir accomplir ses missions clandestines et de collecte de renseignements, la CIA a été divisée en quatre départements durant la majeure partie de son existence. Le National Clandestine Service (anciennement Directorate of Operations) recrute et dirige les agents qui fournissent des informations à l’agence, et il tente également d’influencer et de renverser des gouvernements étrangers, des partis politiques, ou des dirigeants « grâce à des fonds secrets, des entraînements, des opérations paramilitaires, et de la propagande. »[6] Le Directorate of Intelligence accueille les analystes de l’agence, qui assemblent les informations en provenance, entre autres, du personnel humain, des satellites, des émissions de télévision ou de radio, et des publications scientifiques, pour prédire les événements à venir et informer les décideurs politiques. Le troisième secteur, le Directorate of Science and Technology, supervise les images satellites, les communications militaires, les transmissions de missiles, et les communications interceptées, qu’elles aient lieu entre différents pays ou à l’intérieur d’ambassades étrangères. Ce directoire est également en charge de la création de déguisements et de faux documents, comme des passeports étrangers ou des certificats de naissance, qui seront utilisés par les agents sur le terrain. Le dernier département de la CIA est le Directorate of Support (anciennement Directorate of Administration). Historiquement, il s’agit du plus grand département de la CIA. En 1992, il abritait environ neuf mille employés, à comparer aux cinq mille du Directorate of Operations, aux trois mille du Directorate of Intelligence, et aux cinq mille du Directorate of Science and Technology.[7] Ses administrateurs gèrent, avec le Bureau des Ressources Humaines, le registre du personnel de l’agence, le centre d’approvisionnement des bureaux, et le blanchiment d’argent. Ils fournissent aussi des soins médicaux aux agents stationnés à l’étranger, gèrent les besoins de l’agence en matière de voyages et de transports, assignent les autorisations de sécurité, et travaillent avec les partenaires industriels de l’agence dans le monde des entreprises.[8] Le directoire est aussi responsable de la mise en place du système de communication global de l’agence, ainsi que de la technologie et de la sécurité de l’infrastructure informationnelle.

    Chacun de ces directoires était dirigé par le Director of Central Intelligence (DCI). Le DCI était le chef de la CIA, il coordonnait les autres agences de renseignement gouvernementales, et était le principal conseiller du président sur les questions de renseignement international. Mais en décembre 2004, le président George W. Bush signa la loi de réforme du renseignement et de prévention du terrorisme, qui restructura la communauté du renseignement après les critiques de la commission sur le 11 septembre concernant son organisation. Cette loi retira au DCI sa position de coordinateur des autres agences de renseignement, et donna cette responsabilité au bureau du directeur du renseignement national, nouvellement créé. La loi changea également le nom du DCI, qui devint le Director of the Central Intelligence Agency (D/CIA), dont l’unique fonction est désormais de superviser l’agence et de conseiller les dirigeants politiques.

    L’une des nombreuses tâches du D/CIA est d’engager et de travailler avec un directeur des affaires publiques (DPA), pour pouvoir communiquer avec le public (voir tableau 1.1). Ce directeur supervise le bureau des affaires publiques (PAO) de la CIA, qui gère les communications internes de Langley et les demandes émanant des médias, des universitaires et des professionnels de l’industrie du divertissement.[9] Il est important de souligner que la majorité des collaborateurs à Hollywood travaillaient soit au PAO, soit en lien avec lui, et que de 1996 à 2008, le DPA supervisait les agents de liaison de l’agence avec l’industrie du divertissement – Chase Brandon et Paul Barry – dont l’unique activité était d’assister et d’influencer les cinéastes et les romanciers. Cependant, suite au départ de Barry en 2008, le PAO modifia son organisation, et la responsabilité d’assister les cinéastes, les écrivains, et les producteurs de télévision est désormais partagée entre les quatre membres de l’équipe de relations avec les médias, alors que le poste d’officier de liaison avec le monde du divertissement n’est toujours pas occupé au moment de l’écriture de ces lignes.

     

    Tableau 1.1. Les directeurs de la CIA et du bureau des affaires publiques récents

    Tableau directeurs CIA



    La CIA à Hollywood durant la Guerre Froide

    Comme la CIA n’a engagé son premier agent de liaison qu’en 1996, nombreux sont ceux qui ont supposé qu’elle avait été complètement inactive durant la Guerre Froide. Cette supposition n’est pas exacte, d’autres employés de l’agence ayant travaillé avec des cinéastes pour mener à bien des opérations clandestines et des campagnes de propagande. Par exemple, Hugh Wilford explique dans The Mighty Wurlitzer que la CIA était très intéressée par Hollywood durant la Guerre Froide parce qu’elle pensait que les films étaient le meilleur moyen de faire passer des messages pro-démocratiques dans des pays ayant un taux élevé d’illettrisme. La CIA a donc entrepris d’influencer plusieurs productions cinématographiques en travaillant avec des acteurs de l’industrie connus pour leurs sentiments « intensément patriotiques » et anti-communistes, parmi lesquels le cinéaste John Ford, l’acteur John Wayne, et les dirigeants de studios Cecil B. DeMille, Darryl Zanuck, and Luigi Luraschi.[10]

    John Wayne
    John Wayne

     

    Le recrutement par la CIA de Luraschi, chef de la censure aux studios Paramount pour les films distribués aux États-Unis et à l’international, s’avéra productif, bien que cette collaboration fut de courte durée. D’après David Elridge, le travail de Luraschi consistait, lors de la pré-production et de la post-production, à éliminer les images qui auraient pu offenser les marchés étrangers. Il travaillait spécifiquement à éliminer les scènes dans lesquelles les américains étaient décrits comme étant « grossiers, ivres, immoraux sur le plan sexuel, ou ayant ‘‘la gâchette facile’’ », et à éliminer celles ou les américains voyageant à l’étranger étaient décrits comme ayant une attitude impérialiste ou comme étant insensibles aux autres cultures.[11] Luraschi s’assurait que les films montrant des tendances gauchisantes comme Le train sifflera trois fois (1952) et Le petit monde de don Camillo (1952) ne reçoivent pas de distinctions de la part de l’industrie du divertissement, et il informait la CIA des inclinations politiques des autres professionnels du cinéma.[12] Luraschi travailla également avec plusieurs directeurs de casting pour insérer « des nègres bien habillés » dans des films, comme « un majordome nègre très digne » qui apparaît dans Sangaree (1953) et qui a des répliques « qui indiquent qu’il est un homme libre », ainsi qu’un autre dans une scène de golf du film Amour, délices et golf (1953).[13] Ces modifications n’étaient pas ajoutées pour instiller ce que nous appelons aujourd’hui le « politiquement correct » dans l’esprit de la population, mais étaient, comme l’écrivent Alford et Graham, « spécifiquement mises en place pour gêner la capacité qu’avaient les soviétiques d’exploiter le piètre bilan de son adversaire en matière de relations inter-raciales. »[14]

    Don Camillo
    Don Camillo

     

    L’Office of Policy Coordination (OPC), un groupe de réflexion situé dans les locaux de la CIA, œuvra également à discréditer les idéologies soviétiques et à contrer les attaques menées par les communistes contre l’Ouest à travers le cinéma.[15] Au début des années cinquante, deux membres de l’équipe de guerre psychologique de l’OPC qui avaient fréquenté les milieux du cinéma et de la radio entamèrent des négociations avec la veuve de George Orwell pour la cession des droits de La ferme des animaux, son roman allégorique qui donnait une image peu flatteuse de Staline et des pratiques communistes avant la Seconde Guerre Mondiale. D’après l’ouvrage de Tony Shaw, Hollywood’s Cold War, le roman fut choisi par l’OPC parce qu’il pourrait être adapté en dessin animé, qui pourrait être consommé aisément par les illettrés dans les pays en voie de développement et aussi être compris par les ouvriers dans les pays développés où le cinéma joue un rôle plus important sur le plan culturel.[16] Le fait qu’Orwell était un socialiste démocrate permettait aussi une prise de distances avec les capitalistes de droite et pouvait aider à dissimuler le soutien américain à ce projet.

    La veuve d’Orwell, Sonia Blair, finit par accepter de céder les droits à la compagnie de production de Louis de Rochement, RD-DR, avec Carleton Alsop de l’OPC dans le rôle probable d’entremetteur pour financer et conclure l’affaire.[17] De Rochement passa ensuite un accord avec une compagnie d’animation britannique pour produire le film, ceci afin de réduire les coûts, mais aussi parce que « moins l’influence américaine serait visible dans le film, plus son potentiel de propagande serait important. »[18] Bien que le film n’ait jamais été un énorme succès commercial, il généra une importante couverture médiatique. La fin du livre d’Orwell fut également manipulée pour faire passer un message anti-soviétique,[19] ce qui permit à la CIA de propager des idéologies pro-capitalistes sans que le public ne fût au courant de son implication. En fait, Daniel Leab, auteur de Orwell Subverted, souligne qu’il a fallu plusieurs décennies avant que les rumeurs sur l’implication de la CIA dans La ferme des animaux soient correctement documentées, ce qui « en dit long » sur la capacité de l’agence à maintenir le secret sur ses activités.[20]

    La ferme des animaux
    Affiche du film La ferme des animaux

     

    À la fin des années cinquante, la CIA « prit l’habitude de financer secrètement la distribution de films produits à l’étranger, dans des parties du monde considérées comme plus vulnérables au communisme ».[21] En fait, elle reproduisit cet exploit en travaillant aux côtés du Père Patrick Peyton, de la Family Rosary Crusade, et de l’armateur J. Peter Grace en 1958. Grace avait demandé à la CIA de financer la diffusion des films « rosary » en espagnol de Peyton, qui encourageaient le catholicisme, l’unité familiale, et la prière, car il pensait que « la religion était le meilleur rempart contre le communisme ».[22] Le DCI Allen Dulles et le vice-président Richard Nixon donnèrent leur accord à ce projet et fournirent 20 000 dollars à la Family Rosary Crusade pour lancer un programme pilote qui ferait la promotion des films de Peyton en Amérique Latine.[23]

    Mais les efforts pour conquérir les cœurs et les esprits ne s’arrêtèrent pas là. La CIA, par l’intermédiaire de son Psychological Strategy Board, tenta – sans succès – de passer commande auprès de Frank Capra pour qu’il réalise une série de films intitulée Why We Fight the Cold War, et fournit à des réalisateurs des détails sur les conditions de vie en URSS, dans l’espoir qu’ils les incorporent dans leurs films.[24] Elle connut plus de succès avec l’American Committee for Cultural Freedom, contrôlé par la CIA, qui supervisa la production du film de Michael Redgrave, 1984 (sorti en 1958),[25] et toujours en 1958, l’agence fut en mesure d’influencer la production de l’adaptation cinématographique du roman Un américain bien tranquille. Edward Lansdale, un agent de la CIA légendaire, prêta main-forte au réalisateur et scénariste de ce film, Joseph Mankiewicz, pour « retourner l’anti-américanisme » de la nouvelle de Graham Greene et en faire « un film résolument patriotique ».[26] Les modifications apportées par ce duo comprenaient une fin alternative, dans laquelle les communistes, et non le général The soutenu par les américains, étaient responsables d’un attentat à la bombe à Saïgon. Les deux compères révélèrent également au public que les communistes avaient piégé Thomas Fuller pour qu’il assassine l’américain bien tranquille, Alden Pyle, qui ne s’avère finalement pas être un trafiquant d’armes (ce qu’il est dans la nouvelle, et ce que les spectateurs du film avaient été amenés à penser jusqu’alors), mais en fait un simple fabricant de jouets. Une fois le film terminé, Lansdale écrivit au président Ngo Dinh Diem que le film changeait heureusement la « nouvelle désespérante de Greene », et qu’il devrait aider le président soutenu par les américains « à gagner plus d’amis […] [au] Viet-Nâm [et] dans de nombreux endroits du monde où il est diffusé. »[27]

    Comme le montre Harry Rositzke dans The CIA’s Secret Operations, l’âge d’or des campagnes de propagande clandestines de la CIA eut lieu durant les années années cinquante et au début des années soixante, mais finit par décliner vers la fin de la décennie.[28] La CIA continua cependant à utiliser le cinéma et des réalisateurs jusqu’aux derniers instants de la Guerre Froide. Tony Mendez, un agent de la CIA à la retraite, se rappelle qu’à chaque fois qu’un officiel soviétique visitait les États-Unis, l’agence s’assurait qu’il repartait avec des magnétoscopes, des ordinateurs, des magazines de mode, et des films, ce pour attiser l’attraction éprouvée par les soviétiques envers le capitalisme. Mendez prétendait également que les programmes d’opérations clandestines de la CIA comprenaient fréquemment « une composante média très importante », et que son programme « Mighty Wurlitzer[29] cooptait de nombreuses personnalités du show-biz dont on se servait comme ambassadeurs de l’Occident ».[30] Dans la même veine, l’agent de la CIA Paul Barry expliquait comment l’agence avait « injecté » des dizaines d’épisodes de Dynasty (1981-1989) en Allemagne de l’Est durant la Guerre Froide pour vanter les mérites du capitalisme et le mode de vie luxueux qu’il offrait.[31]

    Dynasty
    Dynasty

     

    La CIA travaillait aussi avec des cinéastes pour mener à bien ses opérations clandestines. Mendez, un ancien maître du déguisement, a souvent raconté comment le fameux maquilleur John Chambers[32] travaillait avec le quartier général de l’unité de déguisement de la CIA pour développer de nouvelles techniques.[33] Chambers était au sommet de sa carrière durant sa collaboration avec l’agence ; il venait en effet d’obtenir un oscar pour son travail de maquillage sur La planète des singes (1968). Chambers avait développé pour ce film un matériau malléable qui pouvait être appliqué sur les bras et sur le visage des acteurs, ce qui rendait leur déguisement réaliste, même à une distance relativement courte. Ses inventions, qu’il partagea avec l’agence, furent ensuite encore améliorées pour pouvoir être utilisées sur le terrain. Dans un cas, la CIA s’en servit même sur un homme d’état asiatique et un officier traitant afro-américain pour les transformer en hommes de type européen, ce qui leur permit de continuer à tenir leurs réunions secrètes sans attirer l’attention à Vientiane, au Laos.[34]

    Mais l’aide apportée à la CIA par les maquilleurs d’Hollywood ne se limitait pas à la fabrication de matériel de déguisement. La collaboration avec Chambers s’avéra une nouvelle fois extrêmement utile en 1979, lorsqu’un groupe de militants islamistes s’empara de l’ambassade américaine de Téhéran en soutien de la révolution iranienne. Entre novembre 1979 et janvier 1981, environ cinquante américains furent pris en otage, mais six d’entre eux parvinrent à s’échapper et à se cacher jusqu’à ce que l’ambassade soit entièrement sécurisée. Dans Master of Disguise, Mendez relate comment la CIA put extraire ces six hommes et femmes en les déguisant en une équipe de tournage hollywoodienne. Il écrit : « dans le renseignement, nous essayons en général de faire en sorte que la couverture colle au plus près de l’expérience personnelle de l’individu. Une couverture doit être aussi neutre et inintéressante que possible, afin que l’observateur moyen, ou l’agent de l’immigration plus averti, n’enquête pas trop en profondeur. »[35] Les circonstances étaient toutefois inhabituelles à Téhéran, et Mendez avait pensé que le fait de déguiser ces personnes en une équipe de tournage pourrait fonctionner, précisément parce qu’aucune organisation d’espionnage digne de ce nom n’aurait pu soupçonner qu’un tel stratagème puisse être utilisé.[36]

    Pour mettre en place une couverture convaincante pour les américains, Mendez et son équipe collaborèrent avec Chambers et son confrère maquilleur Bob Sidell pour monter une société de production hollywoodienne du nom de Studio Six Productions, qui annonça bientôt la naissance de son premier projet – un film intitulé Argo qui devait être tourné en Iran. Pour renforcer la couverture des six américains, la société-écran fit bientôt paraître des publicités dans Variety et dans Hollywood Reporter qui annonçaient la production prochaine du film. Ces six américains se firent alors passer pour une équipe de cinéma qui arpentait le pays à la recherche de lieux de tournage, de moyens de transport, etc. La fausse société de production était si convaincante qu’elle put acquérir vingt-huit scripts envoyés par des scénaristes durant sa brève existence, y compris des candidatures de Steven Spielberg et George Lucas.[37]

    Studio Six fut maintenu en fonctions par Mendez, Chambers et Sidell jusqu’en mars 1980, six mois après le retour au pays du petit groupe d’américains, parce que la CIA pensait qu’elle pourrait se servir du projet Argo pour envoyer d’autres américains en Iran. Bien entendu, les équipes de production auraient en réalité été composées de membres de la Delta Force qui auraient secouru les otages restants en utilisant la force militaire, mais l’agence ne mit jamais ce plan à exécution.[38] La communauté hollywoodienne n’eut vent de la ruse de la CIA que dix-sept ans plus tard, lorsque l’agence demanda à Mendez de raconter son histoire. La société de production de George Clooney, Smoke House, a prévu de tourner une comédie dramatique sur cette opération, avec le soutien de la Warner Bros. Le film, qui devait à l’origine être intitulé Escape from Tehran mais qui s’intitule désormais Argo, est coproduit par Clooney et Grant Heslov, avec Ben Affleck à la réalisation et dans le rôle principal.

    Affleck Clooney
    Ben Affleck et George Clooney

     

    Ces exemples ne couvrent pas l’intégralité de l’action de la CIA durant la Guerre Froide, mais ils sont représentatifs, en ce sens qu’ils démontrent que la CIA a collaboré avec l’industrie du divertissement pour promouvoir l’idéologie américaine à l’étranger, et qu’elle a noué des alliances avec des artistes de confiance pour mener à bien des opérations clandestines. La fin de la Guerre Froide entraîna cependant un changement à la fois radical et soudain dans la relation entre la CIA et Hollywood. Au lieu d’utiliser le cinéma comme un élément de la guerre psychologique menée contre les communistes installés à l’étranger, la CIA entreprit de se servir du cinéma et de la télévision pour améliorer son image publique sur le plan intérieur. Ce changement de stratégie fut consommé lorsque la CIA embaucha son premier agent de liaison avec l’industrie du divertissement et qu’elle soutint officiellement le développement de sa première série télévisée. Pour comprendre les raisons de ce changement et la nature du travail entrepris par la CIA pour influencer les médias, la suite de cet ouvrage explorera l’implication de la CIA dans le monde du divertissement après la fin de la Guerre Froide et suite au 11 septembre.

     

    Aperçu de la structure de l’ouvrage

    La CIA ayant souvent prétendu qu’elle avait commencé à travailler avec Hollywood pour améliorer l’image négative que donnaient d’elle le cinéma et la télévision, The CIA in Hollywood s’ouvre sur une vue d’ensemble de la manière dont l’agence a été dépeinte par l’industrie du cinéma. Le premier chapitre, « Voyous, assassins et bouffons », décrit les cinq façons principales par lesquelles la CIA a été représentée à l’écran : comme une organisation (1) qui ne rechigne pas au meurtre, (2) composée d’agents voyous qui agissent sans surveillance, (3) qui ne prend pas soin de ses propres agents, (4) qui agit sur des bases morales ambiguës voire répréhensibles, (5) minée par sa propre bouffonnerie et par sa désorganisation patente. Le chapitre explique ensuite comment l’histoire actuelle de la CIA, les exigences de la narration cinématographique, et les orientations politiques de la communauté hollywoodienne ont contribué à l’élaboration de ces représentations, avant de démontrer que cette image négative n’est qu’une raison parmi d’autres expliquant l’implication actuelle de la CIA à Hollywood – même si elle est de loin la plus citée.

    Le second chapitre, « L’ouverture des portes », poursuit en expliquant pourquoi l’image négative de la CIA au cinéma et à la télévision suscita de plus en plus d’inquiétudes durant la fin de la Guerre Froide et à l’occasion de l’affaire Aldrich Ames en 1994. Ces deux événements furent les causes principales qui incitèrent la CIA à établir une relation formelle avec le monde du cinéma au milieu des années quatre-vingt-dix, et qui donnèrent naissance à sa première collaboration d’importance avec Hollywood – une série télévisée peu connue du nom de The Classified Files of the CIA, fortement inspirée de Sur la piste du crime, la série télévisée d’ABC et de J. Edgar Hoover. Le chapitre explique ensuite pourquoi la CIA embaucha Chase Brandon pour devenir son premier agent de liaison avec l’industrie du divertissement en 1996, détaille les spécificités de ce poste, et révèle comment la CIA est désormais en mesure d’influencer l’écriture des scénarios à la fois dans les étapes de pré-production et de post-production.

    Le troisième chapitre, « Nécessaire et compétente », explore en profondeur deux des collaborations les plus précoces de la CIA qui ont pu être visibles par les spectateurs : le film de Showtime In the Company of Spies, et la série télévisée de CBS Espions d’État. Ces deux projets bénéficièrent d’un accès sans précédent au personnel de la CIA, purent tourner au quartier général de l’agence, et leurs premières fut même programmées sur le tapis rouge, posé pour l’occasion, de Langley. Se fondant sur des documents internes de la CIA et sur des entretiens avec les scénaristes, consultants techniques et assistants-producteurs de ces productions, ce chapitre montre la nature exacte du soutien apporté par la CIA à ces projets. J’examine de plus comment ce soutien permit d’améliorer l’image de Langley à une période où les médias étaient extrêmement critiques envers la capacité de la CIA à collecter des renseignements, voire remettaient en cause son existence même. Ce chapitre révèle par ailleurs comment Chase Brandon et le créateur d’Espions d’État ont imaginé une narration ayant pour objectif d’intimider les terroristes, et comment il est possible qu’ils se soient servi de la série pour imaginer des scénarios de menace terroriste à la demande de la CIA.

    Le quatrième chapitre, « Les années Chase Brandon », s’appuie sur les informations présentées dans le chapitre précédent pour examiner plusieurs autres cas de collaborations avec les médias postérieures au 11 septembre, afin de démontrer plus avant l’étendue et la nature de la relation entre la CIA et Hollywood. S’appuyant plus spécifiquement sur Ennemi d’État, La somme de toutes les peurs, Alias, et La recrue, ce chapitre évoque les motifs qui poussèrent la CIA à travailler à Hollywood, en particulier le recrutement, l’intimidation ou la désinformation de ses ennemis, l’amélioration de son image publique, et l’amélioration du moral de ses employés ainsi que de ses rapports avec l’industrie.

    Le cinquième chapitre, « Les implications juridiques et éthiques de la présence de la CIA à Hollywood », peut-être le chapitre le plus crucial de ce livre, évoque la plupart des problèmes juridiques et éthiques qu’entraîne une collaboration entre la CIA et Hollywood. Plus spécifiquement, il y est soutenu que le refus de la CIA d’apporter son aide l’intégralité des cinéastes qui demandent son assistance constitue une violation du droit à la liberté d’expression développé dans le premier amendement. Le chapitre part aussi du principe que les actions de la CIA à Hollywood doivent être définies comme étant de la propagande, plutôt que comme des campagnes éducatives comme le prétend fréquemment la CIA, et que les actions de la CIA violent l’esprit, si ce n’est la lettre, de la législation sur la publicité et sur la propagande, qui interdit au gouvernement de mettre en place des campagnes d’auto-promotion ou de communication clandestine.

    Le sixième chapitre, « Les dernières personnes que nous voulons voir à Hollywood », s’éloigne des productions ayant reçu un soutien officiel pour analyser le rôle joué à Hollywood par des agents de la CIA à la retraite, et examine les avantages et les inconvénients de leurs travaux selon que l’on se place du point de vue du spectateur, des cinéastes, ou de la CIA elle-même. Ce chapitre s’attarde longuement sur le travail effectué par Milt Bearden et Robert Baer sur Raisons d’état, Syriana, et dans une moindre mesure La Guerre selon Charlie Wilson. Comme les retraités de l’agence n’ayant aucune obligation de donner une image positive ou même équilibrée de Langley, la CIA a prétendu à de nombreuses reprises que les retraités étaient « les dernières personnes » qu’elle souhaitait voir la représenter à Hollywood. L’insatisfaction de la CIA à l’égard de ces retraités a été aggravée par le fait que certaines de leurs collaborations les plus couronnées de succès sont tombées dans la catégorie des docufictions, les spectateurs considérant alors ces films plus négatifs comme historiquement exacts. Ce chapitre, tout en soutenant que leur contribution à Hollywood s’est avérée précieuse, examine donc les tentatives répétées de la CIA de discréditer ces hommes et leurs films. S’ensuit une courte conclusion qui souligne les principales idées du livre.

    Au final, l’objectif de ce livre est de fournir aux lecteurs différentes perspectives sur la relation entre la CIA et Hollywood, et d’explorer un sujet très peu étudié. Je nourris l’espoir que The CIA in Hollywood encouragera le public à consommer les médias d’une façon plus critique, et qu’il éclairera d’une lumière nouvelle le sujet de la propagande gouvernementale.

     

    Notes

    1. Alford et Graham, Lights, Camera.

    2. Aldrich, Regulation by Revelation?, pp. 17-18.

    3. Paul Barry cité dans Jenkins, How the Central Intelligence Agency Works with Hollywood, pp. 490-491. D’après Barry, Chase Brandon emmena avec lui sa liste de contacts et ses dossiers pour créer sa propre société de consultant dans le secteur privé.

    4. Alford and Graham, Lights, Camera.

    5. Central Intelligence Agency, About CIA.

    6. Kessler, Inside the CIA, p. 4.

    7. Ibid., p. 3.

    8. Central Intelligence Agency, Support to Mission.

    9. Comparativement, le personnel du département de la défense est bien plus fourni. D’après Jeff Clarke, responsable des demandes publiques auprès du secrétaire-adjoint à la défense, son bureau des affaires publiques emploie 123 personnes, dont 93 sont des professionnels des relations publiques (le reste étant occupé à des tâches administratives ou aux communications). Ce nombre n’inclue pas les employés qui servent dans les différentes branches du département de la défense, comme la Navy, l’Army et l’Air Force, chacune de ces branches possédant sa propre équipe de relations publiques. Jeff Clarke, au cours d’un entretien téléphonique avec l’auteur en date du 17 mars 2010.

    10. Wilford, The Mighty Wurlitzer, p. 117.

    11. Eldridge, Dear Owen, p. 154.

    12. Ibid., p. 155.

    13. Ibid., p. 159.

    14. Alford et Graham, Lights, Camera.

    15. L’OPC opérait sous la direction des départements d’état et de la défense mais était hébergé par la CIA, qui lui fournissait un support administratif, et qui finit par l’absorber en 1951. Shaw, Hollywood’s Cold War, pp. 75-79.

    16. Ibid., p. 75.

    17. Ibid., p. 76.

    18. Ibid., p. 77.

    19. Voici les dernières phrases de la nouvelle d’Orwell : « Douze voix coléreuses criaient et elles étaient toutes identiques. Inutile, désormais, de se demander ce qui était arrivé aux visages des cochons. Dehors, les yeux des créatures allaient du cochon à l’homme, et de l’homme au cochon, et de nouveau du cochon à l’homme ; mais déjà il était impossible de distinguer l’un de l’autre. » La fin d’Orwell pointe clairement à la fois les gouvernements capitalistes (les hommes) et communistes (les cochons), suggérant ainsi que leurs effets sur la condition humaine ne diffèrent que très peu, et que le pouvoir absolu corrompt absolument. Les fermiers capitalistes sont cependant virtuellement supprimés de la scène finale de la version cinématographique, qui incite à un soulèvement contre les dirigeants communistes.

    20. Leab, Orwell Subverted, p. 137.

    21. Shaw, Hollywood’s Cold War, p. 108.

    22. Gribble, Anti-communism, Patrick Peyton, CSC, and the CIA, p. 543.

    23. Ibid., p. 545.

    24. Leab, Orwell Subverted, p. 93.

    25. Ibid.

    26. Bushnell, Paying for the Damage, p. 38.

    27. Ibid., p. 39.

    28. Rositzke, CIA’s Secret Operations, p. 156.

    29. « The Mighty Wurlitzer » est l’expression employée par la CIA pour désigner sa campagne de propagande culturelle durant la Guerre Froide. Ce programme utilisait fréquemment des vedettes du monde du divertissement pour promouvoir le capitalisme à travers l’Europe orientale et en Asie du Sud.

    30. Tony Mendez, entretien avec l’auteur, 5 mars 2008.

    31. Paul Barry, entretien avec l’auteur, 4 mars 2008.

    32. Chambers porte le pseudonyme de « Jerome Calloway » dans le livre de Mendez, Master of Disguise, ceci pour ne pas violer les règlements de la CIA sur la divulgation de l’identité de ses agents.

    33. Mendez, Master of Disguise, p. 119.

    34. Ibid.

    35. Ibid., p. 276.

    36. D’après Mendez, la CIA n’est pas autorisée à se servir des médias, des organisations religieuses, des étudiants, et du Corps de la Paix comme couverture, à moins d’en avoir reçu l’autorisation par le directeur de l’agence, ce qui explique pourquoi il est inhabituel que la CIA se serve d’une équipe de tournage comme couverture.

    37. Mendez, entretien avec l’auteur.

    38. Ibid.

     

     


  • Commentaires

    1
    tobor
    Dimanche 7 Août 2016 à 21:20
    Il me semble qu'un lourd carcan de propagande pèse depuis toujours sur Hollywood, qu'il soit l'objet de la cia, de la nsa ou du fbi ou encore de divers lobbys idéologiques et consuméristes, aujourd'hui va-t-en guerre malbouffeux transhumanistes et bi-transgenres, etc.

    Si durant le mac-maccarthysme la situation atteignait des sommets de censures et directives axés anti-communiste, c'est qu'il est bien connu que le cinéma est une arme redoutable, comme le rappelait l'infâme "Bibi Netanyahu", bombarder des daubes hollywoodienne vers les jeunes chez ses ennemis désarçonnera à +/- long terme toute réelle rébellion contre les usa et ses "alliés".

    Puis il y avait le "code Hays" depuis 1930 à 1966 avec son code puritain et de bien-pensance, j'ai peine à croire que ces instances de contrôle se soient dissoute pour ouvrir à la toute liberté des auteurs et pencherait plutôt pour leur passage au grand-secret (?)

    De nos jours, chaque cinéaste, comédien/ne qui semblait avoir un début prometteur et un style marqué, teinté de subversion, se fait immanquablement récupérer pour sortir ensuite des méga-production pré-formatées, leur savoir-faire est mis au service d'une propagande à la gloire d'un nouvel ordre mondial, s'en est écœurant!
    2
    Lundi 8 Août 2016 à 01:18

    Bonjour,

    De nos jours, chaque cinéaste, comédien/ne qui semblait avoir un début prometteur et un style marqué, teinté de subversion, se fait immanquablement récupérer pour sortir ensuite des méga-production pré-formatées

    Je pense de plus en plus que ces comédiens et cinéastes n'arrivent pas là par hasard, et que même leur "subversion" des débuts est au service du système. Il me semble que vous avez lu les traductions des extraits de Weird Scenes Inside the Canyon par Dave McGowan, qui montrent que les vedettes de la musique des années 60/70 sont issues de familles haut placées dans le complexe militaro-industriel américain et la communauté du renseignement. La même chose est probablement encore plus vraie pour le milieu du cinéma.

    Par exemple, saviez-vous que Tommy Lee Jones est le cousin germain de Chase Brandon, l'agent de liaison entre la CIA et Hollywood cité dans cet article ? Surement une coïncidence étrange de plus, comme aurait dit Dave.

    3
    tobor
    Mercredi 10 Août 2016 à 03:02
    Merci pour ce complément d'info, Weird scenes inside the canyon est effectivement passionnant et sans doute pas une singularité.

    Outre le fait que nombreuses "stars" sont vraisemblablement des poulain/pouliches conditionnés depuis la naissance, il me semble que les milieux de la production ont les moyens et les techniques pour s'approprier les âmes et consciences d'artistes "talentueux" qui d'office gagneraient un succès auprès du publique, fût-il limité.

    Pour citer un exemple local, il y a Jaco Vandormael. Dans un premier temps, il compilait des interviews de voisins pour mettre en évidence leur bien-pensance décalée et leur tendance à la ségrégation et à la petitesse d'esprit. C'était au sortir des études. Puis il sort un long-métrage intimiste et radical "Toto le héros" au succès retentissant puis un second autour du handicap mental où il réuni des acteurs français reconnus (Daniel Auteuil, Miou-miou, Henri Garcin) et ensuite, il tourne aux usa en 2009 avec Jared Letho,"mr Nobody", un film conforme au standard hollywoodien avec des idéaux transhumanistes.

    Il fini par sortir en 2015 "Le tout nouveau testament", tourné en Belgique, qui m'apparaît totalement perverti sur tous les points,
    un film manipulateur, de très mauvais goût et gentiment dédié aux cousins ricains. C'est un parcours normal pour qui accède à la notoriété, comme en musique, il aura fallu passer des accords qui garantissent une soumission concernant certains aspects de sa création, alors que d'autres se retrouvent boostés d'un paquet de dollar!

    Seul/es des "artistes" vraiment humbles et éthiquement fermes peuvent continuer leur travail de façon cohérente avec des moyens réduits et en restant exclus des médias mainstream.
    4
    Jeudi 11 Août 2016 à 15:20

    Oui, certains outsiders peuvent bien sûr accéder au graal hollywoodien, à condition de montrer patte blanche.

    Je ne connais pas ce Jaco Vandormael, ni aucun de ses films (ma "culture" cinématographique laisse à désirer pour ce qui est des 15-20 dernières années). D'après sa fiche wikipedia, il semble avoir connu une longue traversée du désert avant d'avoir été "recruté".


    Seul/es des "artistes" vraiment humbles et éthiquement fermes peuvent continuer leur travail de façon cohérente avec des moyens réduits et en restant exclus des médias mainstream.

    En France, il est quasiment impossible de survivre en tant qu'artiste mineur sans percevoir de subventions de l'état. Et  même ceux qui conservent un semblant d'indépendance financière sont de toute façon tellement imprégnés de l'idéologie dominante qu'ils la servent sans même s'en rendre compte. Il y a peut-être quelques exceptions, mais tellement peu nombreuses qu'elles ne peuvent être significatives.

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    5
    tobor
    Vendredi 12 Août 2016 à 03:41
    C'est qu'on est devant une mécanique implacable et parfaitement huxléenne où ce qui se fait d'indépendant tente d'imiter les modèles officiels, comme pour montrer que ce talent aurait aussi pu faire l'affaire ou encore, que malgré des moyens modestes, il est possible de créer un film à l'ambiance semblable aux moments creux de super prods.

    Ils tendent d'eux-même à relayer l'idéologie dominante et s'affairent à obtenir un produit formaté à l'image de ce qu'un publique mainstream contemporain est supposé souhaiter.
    Ils cherchent des petits sponsors et se retrouvent pris dans des spirales qui orientent le projet arbitrairement. Et pour tout ça, il n'y a pas de publique, hormis dans des ciné-clubs, concours et festivals!

    Puis il y a le poids culturel de la télé-réalité qui a amené une certaine acceptation de jeux d'acteurs médiocre sur scenarii abscons. Il semble que de grosses prods se mettent au diapason du reality-show comme pour l'encourager.
    Et de fait, si dans un premier temps les médias ont éduqués leur audience, l'heure pour le peuple de montrer qu'il a bien appris la leçon a sonné. On peut aujourd'hui jouer le spectacle du spectacle sur sa chaîne youtube (pas Vimeo! il faut étrangement que ce soit youtube) ou se lancer vers les télés et leur lot de jeux où s'inscrire etc.
    Qu'imaginer comme suite si ce n'est en phase III, le retrait et la disparition pure et simple du média officiel pour ne laisser qu'une masse qui s'auto-informe et diverti, devenant ainsi facilement transcendable par un savoir-faire et une technologie de pointe. Phase III qui correspondrait à une sorte d'effondrement relatif du système en place (?)
    Ceci n'est bien-sûr qu'une extrapolation sans aucune référence.

    On peut se dire que l'alter-ego français de Vandormael c'est Michel Gondry, sans doute, tout les deux aussi carriéristes. Son propos actuel est de vendre une France de rêve aux ricain tout en montrant au publique français qu'il a acquis le langage et les moyens hollywoodiens. Comme Jaco Vdrml, il vend essentiellement du tafta/ttip, de l'anti-conformisme conforme et de la technologie.
    ,
    6
    Samedi 13 Août 2016 à 18:06

    Je ne connais pas plus ce Michel Gondry, ni ses films...

    Je vous avais bien dit que ma "culture" cinématographique de ces dernières années est plus que limitée oops

    La lecture de sa fiche wikipedia est néanmoins intéressante, pour qui sait lire entre les lignes.

    Puisque ce type de sujet semble vous intéresser, je vous recommande la lecture de l'excellent site Spyculture (en anglais), qui propose un décodage de la machine de propagande hollywoodienne et dont les recherches sont le plus souvent documentées.

    Un exemple de documents parmi d'autres : un extrait du dossier du FBI sur le fameux auteur de science-fiction Philip K. Dick, dont de nombreux ouvrages ont été adaptés au cinéma (Blade Runner, Minority Report...), où l'on apprend que "Horselover Fat" renseignait le Bureau sur ce qu'il pensait être une "organisation subversive"  "visiblement anti-américaine".

    7
    tobor
    Vendredi 19 Août 2016 à 00:03
    Avouons que pour la culture cinématographique, il y a peu de plus dispensable!
    Et merci pour ce lien en espérant que mon anglais suive...
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